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À contre-courant

abbé Livio Tonello, directeur

Quand on remonte un fleuve ou lorsqu’on navigue contre vent, on avance à contre-courant. Il s’agit d’une expression du vocabulaire maritime qui est utilisée pour indiquer les situations où l’on va en sens opposé à la tendance générale. On peut le voir dans le choix de ceux qui ne suivent pas les idées prédominantes et qui marchent dans la vie à contre-courant et dans les opinions des chroniqueurs indépendants.

Il y a des personnes qui « effleurent » les dangers et les nouveautés. Dans les Saintes Écritures, les grands prophètes sont à contre-courant, ils ne flattent pas le pouvoir, ils dénoncent l’establishment de leur temps et ils exhortent le peuple à écouter la parole de Dieu. Parfois l’esprit de contradiction peut être un moyen pour se faire remarquer ou pour provoquer.

Il est évident que l’Évangile s’éloigne de la vision dominante et qu’il ne propose pas un chemin facile. Souvent le comportement de Jésus est-il déconcertant et son langage paradoxal : « Celui qui perdra la vie à cause de moi, la sauvera » ; «Heureux les pauvres en esprit, heureux les affligés » ; « Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous ». Jésus propose une vision du monde différente et un nouveau style de vie.

Il invite à aller à contre-courant par rapport à la mentalité du monde, il y a deux mille ans déjà et aujourd’hui encore. Mais quelle était la nouveauté du Christianisme ? La presse laïque fait ses choux gras des informations sur la pédophilie, sur les prêtres impliqués dans des scandales économiques et politiques, elle dénigre les figures institutionnelles en exaltant en revanche les personnages charismatiques.

La réforme de l’Église que le Pape François est en train de faire n’aura certainement pas lieu avec des documents et des décrets. Le point de repère est toujours l’Évangile, le vrai manifeste révolutionnaire. Les grands innovateurs de l’histoire ne peuvent pas être comparés à la figure de Jésus et à son message. L’homme de Nazareth n’a pas pris les armes, il n’a pas incité à la révolution, il n’a pas fait la grève de la faim : avec son l’autorité, Jésus a su transmettre la parole de Dieu. Des paroles de libération, des signes d’espoir, une invitation capable de redonner aux hommes leur plénitude.

Les traditionalistes et les bienpensants en étaient scandalisés. Seulement les cœurs simples ont su accueillir son message révolutionnaire et déstabilisateur. Nous, les chrétiens, nous avons la tâche de redire le message innovateur de l’Évangile. Il ne s’agit pas de dénigrer la culture mais d’aller contre-courant quand c’est nécessaire.

Quand il s’agit du bien commun, de la dignité de la personne humaine et de celle des plus fragiles, alors le moment est arrivé de faire émerger la force extraordinaire de l’Évangile. La pandémie nous a mis à l’épreuve mais elle nous a indiqué aussi la voie pour retrouver les sources du bien en mettant en discussion l’idée du bonheur basée sur l’égoïsme.

Face au coronavirus, les beaux gestes de solidarité se sont multipliés et nous ont rappelé qu’on ne se sauve pas tout seul et qu’il n’est possible de se sauver qu’ensemble car on est tous dans le même bateau. Combien de gestes de bonté, combien de bien fait autour de nous... si nous étions seulement capables de les voir !

Le virus atteint les personnes de toutes les races et de tous les âges et il ne s’arrête pas aux frontières : de même les chrétiens ne peuvent pas trouver d’obstacles assez hauts pour les empêcher de partager le message révolutionnaire de la bonne nouvelle de Jésus.