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Travail béni...

abbé Livio Tonello, directeur

On en parle beaucoup car il y en a peu et parce qu’il est souvent mal distribué. Le futur ne semble pas rose et les jeunes sont de plus en plus découragés. Dans les milieux ecclésiastiques aussi, on est très attentif à ce problème car le travail n’a pas seulement un caractère matériel mais spirituel aussi. Il est lié à l’œuvre créatrice de Dieu car c’est une œuvre humaine qui trouve le sens profond de ses racines dans la personne de Dieu créateur. Dès le début en effet Dieu crée et puis il se repose, satisfait de ce qu’il a fait (Genèse 1-2).

Selon la Genèse 3,17 «C’est à la sueur de ton front que tu gagneras ton pain», l’homme est condamné à travailler car il a ôté son sens à son action au sein de l’œuvre créatrice de Dieu. Quand on perd la source et le sens de la signification profonde, on perd la valeur et la force pour vivre. L’Église a toujours motivé le sens du travail de l’homme en saisissant son intime spiritualité. On connaît les encycliques sociales à partir de la Rerum novarum du Pape Léon XIII, les Semaines sociales des catholiques et l’engagement des travailleurs.

L’attention à la dimension humaine fait partie de la doctrine de l’Église pour affirmer la valeur de notre présence dans le monde et la tâche qui nous incombe de collaborer à l’œuvre de la création qui se déroule dans le temps. «Avec leur travail, ils (les hommes) prolongent l’œuvre du créateur, ils se rendent utiles à leurs frères, et ils donnent leur contribution personnelle à la réalisation du projet providentiel de Dieu dans l’histoire» (Gaudium et spes 34).

L’attention et l’intérêt ecclésiaux pour le monde économique ne sont pas finalisés en premier lieu à créer des emplois, à produire et à garantir un salaire. Tout ceci concerne les politiques sociales. La pensée chrétienne invite à réfléchir sur la “vocation” originaire existant dans le travail de nos mains: un appel de Dieu qui trouve dans la réponse humaine la réalisation de la dignité de la personne. Sans doute les discours sur la perte d’un poste de travail stable, sur la lente croissance du PIB, sur la globalisation et sur l’immigration sont plus immédiats et plus contraignants... mais les mêmes revendications ne saisissent pas toujours entièrement les exigences fondamentales.

Combien de travailleurs insatisfaits de leur emploi ne se sentent pas réalisés dans ce qu’ils font, vivent dans le surmenage des heures passées à l’usine ou au bureau, voient sombrer les valeurs importantes de la vie... Les polémiques liées à l’ouverture le dimanche des supermarchés et des magasins en sont le témoignage. Elles montrent que le profit n’est pas le premier but mais que ce qui compte vraiment est la dimension significative et profonde pour vivre mieux. Il faudrait travailler pour vivre et pas vivre pour travailler. Il ne suffit pas d’améliorer les conditions de travail et garantir un emploi à tous: il faut retrouver le goût de ce que nos mains et notre créativité produisent.

Ce n’est donc pas par hasard que l’on voit émerger des travaux manuels qui ont disparu depuis longtemps et qui exaltent les capacités de la personne. Ce sont souvent des travaux liés à la terre, à la culture, à la production qui n’est pas en série, comme autrefois. Ce n’est pas seulement l’homme qui crée le travail mais c’est le travail aussi qui façonne et qui réalise la personne. La satisfaction de Dieu qui au sixième jour de la création vit que “cela était bon”, devrait être la satisfaction de chacun d’entre nous, qui sommes bénis dans ce que nous faisons, pour que nous nous sentions les collaborateurs d’un projet beaucoup plus grand, dont nous faisons partie, qui dépend en grande mesure de nous et que Dieu bénit.