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Le cœur de l’usurier

Alfredo Pescante

La scène sculptée sur le sixième haut-relief, derrière le tombeau de saint Antoine, est effrayante à cause de la plaie sur la poitrine du jeune usurier gisant sur son lit de mort, signe du pouvoir de thaumaturge du Saint qui fait retrouver son cœur dans le coffre. La blancheur du marbre met en évidence de manière très efficace un chapitre important de la vie d’Antoine: la lutte contre les usuriers «les personnes qui avec leurs dents broient les pauvres». Le Saint ici est pur Évangile tandis qu’il admoneste: «Là où il y a ton trésor, il y a ton cœur».

Tullio Lombardo, le grand artiste qui réalisa ce haut-relief (1525) a satisfait le désir de ses commanditaires qui le savait capable de toucher les usuriers, car l’usure était une véritable plaie de la société de l’époque. Ce merveilleux groupe de personnages atteint le sommet de la beauté classique et chaque personnage interprète la scène avec ses yeux, sa bouche et son attitude, en invitant à témoigner le miracle «avec une extraordinaire expression des émotions». (Pietro Selvatico)

Antoine regarde le jeune visage et, avec un frère à ses côtés, semble dire: «Regardez si dans sa poitrine il y a son cœur!». Trois hommes barbus, après avoir examiné le corps inerte en mettant même une main dans la plaie, donnent raison au Saint après qu’un homme âgé a ouvert le coffre. Les deux dames élégantes ont compris les premières la vérité. Le petit nu semble répéter avec les autres: «Les richesses ne valent rien!». Il dit ce que pensait Antoine qui demandait la sépulture du pécheur «dans un lieu non consacré, comme un chien».

L’épisode n’est pas le fruit de l’imagination, mais c’est une histoire écrite par Servasanto da Faenza avant 1280, à la suite de la narration de l’épisode par une personne ayant assisté à l’événement.