À quelles conditions les religions sont-elles des facteurs de paix ?

Depuis plus de cinquante ans, le 1° janvier, on célèbre la Journée mondiale pour la paix. En 2021, il s’agira de sa cinquante-quatrième édition. Associer les religions et la paix peut sembler tout d’abord une opération un peu difficile. Malheureusement, les leçons de l’histoire nous amènent à associer plutôt les religions à des guerres.

On est bien conscient que, pendant des siècles, les religions ont été utilisées pour justifier des conflits et des violences et qu’en de nombreuses occasions, on a considéré comme affrontements religieux des invasions, des luttes armées et des violences. Les recherches historiques mettent souvent en lumière que les motivations religieuses sont utilisées comme prétexte pour cacher les véritables raisons économiques et politiques.

Il faut donc analyser attentivement le lien entre religions et politique et aussi entre religions et économie. Combien de fois la recherche historique plus approfondie souligne que « en réalité, la vraie raison du conflit fut... » en mettant au centre la question de la domination politique et de l’expansion commerciale. Donc les allusions à la religion courent toujours le risque d’être instrumentalisées.

Si on analyse attentivement ce sujet, on remarque que dans toutes les religions, il y a une perspective d’universalité et pour la réaliser on invite, parfois avec urgence, à utiliser des moyens pas toujours pacifiques. Parfois en effet l’exhortation et le témoignage de sa foi utilisent des moyens agressifs et violents. Puis dans chaque religion, nous pouvons retrouver un certain « langage militaire » qui peut changer et se nuancer selon la sensibilité des époques. Par exemple, l’expression « soldat du Christ » s’associe encore dans l’imaginaire collectif au sacrement de la Confirmation.

Saint Paul aussi utilise le langage des chevaliers pour parler de l’expérience de foi : l’épée de la parole, l’armure de la foi… (Éphésiens 6,11) Puis il y a la question de la soi-di-sant « guerre sainte » (la Jihād de l’Islam) que l’on connaît souvent de manière superficielle. Dans un premier temps, le Bouddhisme et l’Hindouisme semblent être des religions plus « pacifiques » mais les leçons de l’histoire et l’amalgame des questions politiques et économiques confirment qu’une dégénération est possible aussi au sein de ces expériences religieuses.

Par exemple, l’actuelle situation politique indienne influencée par l’hindouisme fondamentaliste nous fait comprendre qu’il serait superficiel de considérer ces religions uniquement comme une source de paix et de sérénité et de craindre l’Islam comme une religion violente. L’entrelacement tout à démêler entre religions et violence, entre religions et guerres, est un sujet qu’il faut surveiller de près.

On a dû mentionner brièvement ces questions pour avoir une conscience sincère de la réalité mais surtout pour regarder vers des horizons nouveaux car la perspective la plus prometteuse est celle de penser et de vivre les religions pour la paix. La Journée Mondiale de la Paix proclamée par le Pape nous montre la voie de l’espérance et de la réconciliation. Chaque année, la fête du 1° janvier nous stimule à nous demander si, comme chrétiens, nous sommes des « opérateurs de paix » selon le texte des Béatitudes : « Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu. » (Mathieu 5, 9) Cette béatitude devrait être au cœur de l’identité chrétienne car être fils de Dieu demande une vie au service de la construction de la paix.

À ce propos, nous rappelons le projet pour une éthique mondiale coordonné à partir des années 90 par le théologien suisse Hans Kung qui créa l’affirmation : « Il n’y pas de paix entre les religions s’il n’y a pas de dialogue entre les religions. » En effet en 1993, un siècle après la première réunion du Parlement des religions, à Chicago, les deux-cents délégués présents signèrent une Déclaration pour une éthique mondiale.

Une troisième voie est marquée par une expérience de collaboration entre les religions vécue par le mouvement international Religions for Peace (www.religionspourlapaix.org) qui depuis 1970 s’est engagé à faire progresser la paix grâce au dialogue entre les croyants des grandes religions.

Religions for Peace réalise de nombreuses initiatives surtout dans le domaine de la connaissance et de l’information, parmi lesquelles nous rappelons la publication d’un calendrier interreligieux qui présente les traditions et les grandes fêtes religieuses dans la volonté commune de développer une meilleure connaissance les uns des autres.

 

Fr. Giulio Osto